24 déc. 2011

1st post

Bonjour ou bonsoir, cher ou chère visiteur (visiteuse?)
Un peu d'étymologie : "blog" vient de l'abréviation de "web log" qui pourrait se traduire par "journal sur le web", et en d'autres termes bienvenue dans mon petit fourre-tout. D'ici peu, devrait y avoir par là des textes (sur tout et n'importe quoi), des petits dessins, des vidéos + ou - fun, des pensées + ou - absurdes, et en gros voilà quoi ! Un blog qui vient tout juste à la période des fêtes, cadeau de moi à moi (oh, c'est trop mignon !) et à propos de cadeau, je vous laisse avec Game Over, mon dernier court produit par Défi Ciné pour la 30ème édition de Kino Session. N'hésitez pas à laisser un p'tit mot !


Voilà, sur ce, je dis à très bientôt sur un quasi-haïku de réveillon :

......Quand la nuit tombe vite
......De mousseux et foie gras
......Mes papilles trépignent !

... et bonne année !

18 déc. 2011

Les presque aventuriers du Vatnajökull

Exercice live (le temps d'une soirée) sur VosEcrits.com
Thème libre, contrainte personnage : "mon frère (ou le vôtre)", contrainte lieu : "Islande"



1.
- Et donc ? Qui avait raison ?
- Très bien, je m’incline. Vous aviez raison.
Satisfait, j’entrepris de me lécher les lèvres, encore toutes humides de cognac.

2.
- Au secours !
- Ne crains rien, on va s’en sortir !
- J’ai peur !
- Dieu tout puissant !

* * *

Mais comment, par quel diable, me suis-je retrouvé dans cette galère ? En quelques minutes, j’ai l’impression d’avoir vécu cent ans de solitude, et qu’on va me retrouver congelé dans la glace comme cette femme dans La Nuit des Temps. Pour peu que la mécanique du cœur fonctionne encore, et si ça marche alors la vie est un miracle. Remettons les souvenirs en place.

* * *

3.
La petite Lizzie regardait par-dessus le hublot. Les glaces du Vatnajökull s’étendaient à présent sous la buée de son souffle et les traces de ses doigts.

- Ne nous fâchons pas, Marisa. C’était mon frère, ou le vôtre.
- Ç’aurait dû être le mien. Vous me déçûtes, mon cher.
- Mon choix vous aurait-il à ce point déplu ?
- Vous êtes dans le vrai. Mais brisons sur ce sujet, voulez-vous ? La lecture de ce magazine féminin de bas-étage a pour moi des charmes insoupçonnés, et je vous saurais gré de me laisser en paix durant son déchiffrage ô combien passionnant.

Jamais Marisa ne m’était autant insupportable que lorsqu’elle prenait ses mines hypocrites et ce ton ampoulé. De quoi se plaignait-elle ? Elle avait obtenu qu’on parte pour l’Islande, et plus l’avion se rapprochait de Keflavík, plus son humeur semblait perdre en altitude. Quant à la dispute à propos de nos frères respectifs, je ne vois pas comment elle pouvait encore critiquer mon choix, pourtant légitime : il avait d’abord été convenu que nous ne partirions que tous les trois, la petite, elle et moi, comme une famille normale. Hors, Madame ayant des atomes crochus – un peu trop à mon goût – avec le monde de l’exploration, il fallait quelqu’un pour garder la petite qu’il était hors de question d’emmener lors d’une expédition sur le Grímsvötn, par exemple.

- Mon père, c’est là qu’on va, n’est-ce pas ?
- Oui, Lizzie chérie, c’est bien là. Tiens, regarde : la plus haute montagne, là, c’est l’Öræfajökull. Un dangereux volcan, ne tombe jamais dedans.
- Aucun risque, avait sèchement aboyé Marisa.

Elle replongea furieusement la tête dans son magazine, sans prononcer un mot. Elle ne me pardonnerait décidément pas la présence de mon jeune frère, endormi comme un loir la tête contre la partie du hublot que les mains de Lizzie ne recouvraient pas. Parce que, quitte à aller en Islande, je voulais moi aussi prendre part aux expéditions aventureuses et, pour ne pas que Lizzie se retrouve seule, nous avions d’un commun accord décidé qu’une tierce personne nous accompagnerait, et qu’on se relayerait, lui et moi, auprès de la petite. Chacun proposa un frère. Elle le sien, moi le mien. Je trouvais qu’emmener Stou’ serait une bonne idée, vu qu’il n’avait presque jamais voyagé, et qu’il s’entendait à merveille avec Lizzie. Mais Marisa préférait son frère à elle, qui avait déjà été à nos côtés en Patagonie, et serait par conséquent à l’aise dans les glaciers islandais. Et me reléguerait donc au rôle de nounou exclusive, au final. La victoire, finalement, se fit au porte-monnaie : son frère, qui menait une vie de Bohême, n’avait pas de quoi s’offrir le billet, et moi, j’avais largement de quoi payer celui de Stou’. Stou’ qui, à présent, dormait au milieu de ses cheveux longs et de la musique de Sigur Rós qui continuait à s’échapper de ses écouteurs, posés de part et d’autre de la barbe naissante qu’il avait tenu à laisser pousser pour « mieux résister au froid là-bas ».

- Père, on fera des batailles de neige au bord des lacs ?
- Avec plaisir, Lizzie chérie.
- Marisa n’avait rien trouvé rien à redire. Ça ne partait pas si mal, finalement.

* * *

- Vous saviez que Reykjavik veut dire « baie des fumées » en islandais ? C’est poétique ! Et c’est là qu’Ingólfur Anarson, le premier colon, est arrivé en 874. Aujourd’hui, Reykjavik regroupe plus de la moitié de la population islandaise !
- Content de voir que tu t’intéresses au pays, Stou’ !
Stou’ avait le nez plongé dans son guide illustré pendant que Lizzie piaffait d’impatience en attendant d’aller voir les « gizaires », surtout le Strokkur qui crache son eau à vingt mètres de haut. Seule Marisa s’assombrissait, comme un volcan entouré de la fumée annonciatrice de l’éruption proche. Je pris le parti de ne rien dire jusqu’à ce qu’on arrive à l’hôtel.
- Attends, je vais saluer le type à l’accueil : « gódan dag, hvernig gengur ? » formula Stou’ avec enthousiasme. Yeah, t’as vu ça, Lizzie ?
Lizzie approuva avec un grand sourire d’admiration. L’hôte répondit par une phrase que Stou’ ne comprit pas.
- Heu… heu… « ég skil ekki », dit-il après avoir trouvé dans son guide la phrase signifiant « je ne comprends pas. »
L’hôte rit de bon cœur, Lizzie se moqua de son oncle, et Marisa se chargea de régler les affaires courantes en anglais. Elle m’apprit peu après que la première expédition était programmée pour le surlendemain, avec l’accompagnement d’un certain Sturlusson.

* * *

- Aide-moi, je vais tomber !
- Oui, attrape ma main.
- Je la tiens !
- Non, attention où tu mets ton pied !
- Aïe !

4.
Ce fut difficile de calmer les pleurs de Lizzie quand elle apprit qu’elle ne nous accompagnerait pas aux lacs glacés du Vatnajökull. Je faillis même me fâcher avec Stou’ qui, bien plus heureux ici que dans son studio d’étudiant, se sentait l’âme d’un conquérant et n’entendait pas rester confiné en ville, bien qu’il y ait à Reykjavik largement de quoi s’occuper. Quoiqu’il en soit Marisa ne semblait guère s’en soucier et, à l’heure du départ, son sac et le mien étaient prêts.

- Très cher, avez-vous su faire entendre raison à notre fille ?
- Non.
- Tant pis pour elle. Et votre frère ?
- Pareil, il proteste.
- Je vous avais bien dit qu’il ne fallait pas l’emmener.

Le dénommé Sturlusson arriva à quatre heures précises dans son 4x4, on posa les sacs et nos derrières, on prit la route, de longues heures. Je pensais à Lizzie, me promis de l’envoyer en colonie de vacances sur la Côte d’Azur pour la prochaine fois.

* * *

- Ah, très cher, je me sens l’âme d’une Viking ! Quelle beauté que ces blanches étendues à perte de vue, ce ciel froid, ces nuages argentés.
- Ravi de vous voir enfin de bonne humeur, Marisa chérie.
Elle ne me répondit pas, enchantée par les nouvelles chaussures de randonnées qu'elle baptisait au verglas islandais. Sturlusson dit quelque chose que je n’entendis pas, ils échangèrent quelques mots. C’est alors que cela se produisit.

* * *

Marisa avait juste eu le temps de me prévenir que nous allions subir un sérieux grain, sans m’en préciser la nature. En vérité, c’est plus qu’un grain : le sol se déroba littéralement sous mes pieds.
- Aarg !
J’entendis la voix de Marisa crier au loin. Peut-être qu’elle et son Sturlusson étaient dans la même situation que moi. Je levai les yeux : le ciel était à trois mètres au-dessus de moi, et le sol grondait. Je songeais à une surge glaciaire, quand j’entendis, malgré le fracas, la voix de l’Islandais crier « jökulhlaup ! Jökulhlaup ! ». Bien sûr, une débâcle glaciaire, la rupture par fusion du barrage de glace qui retient un réservoir d’eau. Qui dit rupture, dit crue : si je ne parvenais pas à sortir de ma crevasse, j’allais rapidement être submergé par des flots torrentiels. J’avais entendu parler de ce phénomène en Patagonie, lors de notre expédition au Campo de Hielo Sur : le frère de Marisa disait en avoir déjà vu un au Perito Moreno, mais que les plus violents avaient lieu… en Islande. Marisa devait me maudire à l’instant présent d’avoir refusé qu’il nous accompagne, ce frère qui connaissait le Champ de glace Sud de Patagonie comme peu d’Européens le connaissent. Mais enfin, me dis-je, ce Surlusson qu’elle avait contacté devait bien s’y connaître lui aussi en calotte glaciaire ? Un nouveau grondement coupa court à mes interrogations.

- Au secours ! hurla Marisa.
- Ne crains rien, on va s’en sortir, répondis-je sans trop y croire à cette voix que je ne pouvais voir.
- J’ai peur !
- Dieu tout puissant !
Je venais de le voir : le filet d’eau qui s’écoulait entre mes pieds, et un petit jet régulier qui perçait la paroi à quelques centimètres de moi.

* * *

5.
Mais comment, par quel diable, me suis-je retrouvé dans cette galère ? En quelques minutes, j’ai l’impression d’avoir vécu cent ans de solitude, et qu’on va me retrouver congelé dans la glace comme cette femme dans La Nuit des Temps. Pour peu que la mécanique du cœur fonctionne encore, et si ça marche alors la vie est un miracle.

Je me sentais tel ce soldat dans Guerre et Paix qui, empêtré de neige russe et sentant la fin proche, choisissait d'adresser une pensée aux êtres chers plutôt que de fouiller dans son sac à la recherche de quoi que ce soit d’utile. Sauf que, contrairement à lui, je n’étais pas blessé. Mais je ne pouvais pas m’empêcher de penser très fort à Lizzie. Tellement fort que j’entendais presque sa voix résonner à mes oreilles.
- Père ! Mon père !
Alors je criai « Lizzie ! » comme pour répondre à cette voix, en me disant qu’au bout d’un moment c’est un torrent de larmes qui me noierait et non celui du glacier.
- Mon père ! Où êtes-vous ?
« Perdu, perdu, au fond d’une crevasse », répondis-je, sentant l’eau me venir aux yeux, et submerger mes mollets.
- Je vous entends ! Où êtes-vous ?
Attends une minute.
- Lizzie ? j’ai crié à nouveau.
- Oui, père ! On est là, Stou’ et moi !
Par tous les saints !
- Lizzie ! Lizzie ! Par ici ! hurlai-je alors à pleins poumons.
- Père ! Je vous vois !
La petite tête blonde adorée venait en effet de surgir du haut de la crevasse.
- Stou’ ! Stou’ ! Viens vite, je l’ai trouvé !

Dix secondes après, l’oncle avait rejoint la fillette. Tout en criant des ordres que mes sens en alarme ne me permettaient d’entendre qu’à moitié, il me jeta une corde solide que j’attrapai sans poser de questions. J’eus tôt fait d’être en haut et d’essuyer la plus terrible avalanche de bisous de ma vie, œuvre d’une Lizzie hystérique, et je crois que j’aurais donné beaucoup pour que le temps s’arrête quelques secondes, histoire de savourer. Stou’, en revanche, ne perdit pas son sang-froid, et me demanda où se trouvait Marisa. Aussitôt je me défis de Lizzie, et bondit là où je l’avais vue pour la dernière fois. Elle était à un mètre au-dessous de moi, agrippée à une petite corniche, surplombant un fossé d’au moins cinq mètres.
- Aide-moi, je vais tomber ! cria-t-elle aussitôt qu’elle m’aperçut. Je fus très légèrement étonné qu’elle abandonnât son habituel vouvoiement, mais l’heure n’était pas à la plaisanterie, aussi me gardai-je de le lui faire remarquer.
- Oui, attrape ma main.
- Je la tiens !
- Non, attention où tu mets ton pied !
- Aïe ! vociféra Sturlusson, dont les doigts de la main droite se trouvaient sous le talon de Marisa.

Finalement, quelques minutes plus tard, tout le monde était tiré d’affaire, et on se hâta de changer de position géographique pour ne pas se retrouver pris dans la crue du jökulhlaup. Stou’ m’expliqua brièvement que Lizzie demeurait inconsolable après notre départ et que, lui-même se sentant frustré de ne pas partir à l’aventure, ils avaient pris un taxi dans le but de nous suivre. « J’ai bien regardé dans le guide illustré comment s’y prendre pour donner les explications, et on a réussi », avait-il dit, concluant par un théâtral « Rien ne peut empêcher un oiseau de voler quand il se sent pousser les ailes du désir ! »

* * *

6.
De retour à l’hôtel, je m’empressai de demander l’adresse du meilleur restaurant de la ville, pour terminer en beauté cette aventure tumultueuse. Et aussi, au service d’étage, qu’on apporte une bouteille d’un excellent cognac à la chambre que nous partagions, Marisa et moi. Tandis que Lizzie et Stou’ se préparaient pour le dernier, je servis deux verres, pour mon épouse et moi-même. Je lui tendis le sien avec un grand sourire, elle devina mon intention.
- Quelque chose de complètement extérieur à cette histoire vous réjouit beaucoup, n’est-ce pas ?
Je bus une gorgée comme pour lui prouver qu’elle avait raison.
- En effet, Marisa. A propos de nos frères. Si le vôtre était venu, il vous aurait accompagné au Vatnajökull, j’aurais passé la journée à Reykjavik avec Lizzie, et vous seriez restés bloqués dans cette crevasse. Tandis que, puisque Stou’ est venu…
- J’ai compris, j’ai compris. Je pense qu’il aura droit à un cadeau des plus coûteux à son prochain anniversaire, puisque je lui dois la vie, c’est bien ça ?
- Et donc ? Qui avait raison ?
- Très bien, je m’incline. Vous aviez raison.
Satisfait, j’entrepris de me lécher les lèvres, encore toutes humides de cognac.

17 déc. 2011

Nocturne

Elle vient toujours avec la nuit
Lorsque le ciel s'enfuit sous cape
Cette impression que l'on s'échappe
Vers un monde éloigné du bruit

Alors tâtonnant on attrape
Quand plus rien ou presque ne luit
L'obscurité où sont les fruits
Mûrissant en fertiles grappes

Pour exprimer des petits riens
Écrire les choses qui sont loin
Coucher sur papier un émoi

Dire à la lune que l'on va bien
Dire aux étoiles de prendre soin
De ceux qu'on voudrait près de soi

_ _ _

pour la lecture : e muets à "elle" (§.1, v.1), "écrire" (§.3, v.2), "lune" (§.4, v.1) et "étoiles" (§.4, v.2)